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MUTAFUKAZ de Shoujirou Nishimi et Guillaume « Run » Renard [Critique Ciné]

 

Mutafukaz

 

Forte de son succès dans le monde entier, la bande dessinée française Mutafukaz devient un long métrage animé réalisé conjointement par son créateur Guillaume « Run » Renard et le japonais Shoujirou Nishimi qui sort enfin en salles après une longue tournée des festivals.

 

 

SYNOPSIS : Angelino se morfond dans la ville glauque de Dark Meat City où il est livreur de pizzas. Tombé sous le charme de la belle Luna, il va être victime d’un accident de la route. Sorti sans dommages corporels, il va rapidement se rendre compte que l’accident lui a tout de même causé d’étranges hallucinations. Et qui sont ces hommes en costume noir  qui semblent le suivre partout où il va ? Autant de mystères que le jeune homme va tenter de résoudre au péril de sa vie.

 

Avant même de devenir une bande dessinée vendue à plus de 145 000 exemplaires à travers le monde, Mutafukaz avait d’abord été un court métrage d’animation qui avait fait déjà fait sensation en 2002. Ce n’est qu’en 2006 que la bande dessinée créée par Guillaume « Run » Renard a vu le jour. Seize ans plus tard, la sortie en salles d’un long métrage d’animation a les allures d’une véritable consécration ! Fort du succès de Dofus, le studio Ankama a pu enfin mettre en chantier cette adaptation dont les rênes ont été confiés à son dessinateur et scénariste Guillaume « Run » Renard. Face à l’ampleur du challenge pour un jeune studio français, ils ont choisi faire appel aux japonais du Studio 4°C, créateur de plusieurs segments de l’anthologie Animatrix connu aussi pour le déjanté Mind Games de Masaaki Yuasa oubien encore Amer Beton dont l’univers colle parfaitement à celui de cette bande dessinée.

 

Mutafukaz

 

Alors que le premier court métrage était en image de synthèse, c’est un film en animation traditionnelle qu’ont réalisé cette fois ci Guillaume « Run » Renard et Shoujirou Nishimi assisté cependant comme cela est désormais habituelle pour un peu d’image de synthèse. Le résultat est forcement beaucoup plus beau que le court métrage de 2002. C’est très coloré, vif et formidablement bien animé mais légèrement surprenant dans ses graphismes. Souhaitant rester le plus fidèle à la bande dessinée, les graphismes auront de quoi surprendre les non initiés. Si les personnages principaux sont très réussis, tous les personnages secondaires paraissent vraiment étranges. Une impression curieuse de ne pas être vraiment dans le même film avec ces grands méchants cartoonesques qui semblent bien porter la patte du Studio 4°C et qui peuvent aussi parfois faire penser aux films de Bill Plympton comme le récent La Vengeresse ou bien la série Lastman inspirée de la bande dessinée de Bastien Vivès. De ce coté là, c’est une vraie déception car le film n’est clairement pas aussi beau que la bande dessinée. C’est particulièrement flagrant dans un curieux slideshow de planches d’illustrations, bien plus belles que le reste du film, qui arrivera sans crier gare avant la dernière partie alors qu’il aurait pu faire un très beau générique de fin.

Malgré ces allures de dessin animé japonais, Mutafukaz reste bien français et nous n’aurons malheureusement pas d’autres choix que de devoir supporter un doublage en français très décevant. C’est au rappeur Orelsan, qui avait déjà doublé la série One Punch Man, qu’a été confié le rôle d’Angelino. Un choix difficile à comprendre tant la voix du rappeur manque de dynamisme. Est-ce vraiment ainsi que Guillaume « Run » Renard imaginait la voix de son héros ? Est-ce parce qu’il est fan ou tout simplement pour tenter d’attirer un public plus large qu’il a été choisi ? On se le demande. De plus pour incarner son colocataire et ami Vinz, c’est Gringe l’autre moité du duo musical Casseurs Flowters qui a été choisi. On ne pourra pasdu coup s’empêcher de faire le rapprochement avec leur série Bloqués tant les personnages de glandeurs sont très similaires.

 

Mutafukaz

 

Le plus gros point faible de Mutafukaz est cependant son intrigue qui risque de laisser ceux qui n’ont pas lu la bande dessiné sur le carreau. Si la première scène du film nous montre un Angelino encore bébé en danger avec sa mère, on ne saura pas grand chose des origines de cet étrange personnage qui ressemble presque plus à une fourmi qu’à un humain. De même pour son coloc Vinz squelette au crane enflammé façon Ghost Rider ou leur meilleur pote Willy chauve souris plutôt étrange qui évoluent normalement tous les trois dans un monde d’humains sans que l’on sache ce qu’ils sont vraiment. Si une partie de l’intrigue trouvera une conclusion, le film nous laisse cependant sur notre faim comme si une suite était déjà en chantier alors que le succès d’un tel long métrage est plus qu’incertain et pourrait mettre de longues années à sortir vu le temps qu’il a fallu pour voir ce premier film. Le film ne fait que survoler l’histoire de la bande dessinée et n’arrivera même pas à nous expliquer quels sont les pouvoirs que semblent avoir découverts Angelino à la suite de son accident.

Il faut aussi signaler de gros problèmes de rythme voir même de montage dans Mutafukaz. Si les scènes d’action sont réellement spectaculaires, probablement grâce à la maîtrise des japonais du Studio 4°C, et méritent à elles seules de voir le film,  d’autres séquences se traînent en longueur et paraissent même par moment sortir vraiment de nulle part. Dans l’ensemble, le film n’arrive clairement pas à la cheville d’un véritable dessin animé japonais probablement à cause d’un budget limité. Cela se voit surtout dans l’animation avec une déficience d’animation notamment sur les mouvements des lèvres limités au strict minimum. La marge de progression pour la suite est énorme, reste à voir si elle verra le jour.

 

Mutafukaz

 

On aurait adoré pouvoir dire que Mutafukaz est une grande réussite mais ce n’est malheureusement pas le cas. Si ce genre de film d’animation est une rareté dans le paysage française, le long métrage de Shoujirou Nishimi & Guillaume « Run » Renard souffre de trop nombreux défauts pour nous convaincre pleinement entre un doublage français vraiment mal choisi et de nombreuses scènes ennuyeuses. Il faudra vraiment avoir lu la bande dessinée pour arriver à comprendre complètement cette histoire qui prend trop de temps pour ne pas raconter grand chose et nous laissera sur notre faim histoire de développer une véritable franchise. Mais verra-t-elle vraiment le jour si le succès en salles n’est pas au rendez-vous ?

 

MON AVIS : 2/5

 

 

FICHE TECHNIQUE :

  • REALISATEURS : Shoujirou Nishimi & Guillaume « Run » Renard
  • AVEC LES VOIX DE : Orelsan, Gringe, Redouanne Harjane & Féodor Atkine
  • SCÉNARISTE : Guillaume « Run » Renard
  • COMPOSITEURS : The Toxic Avengers & Guillaume Houze
  • GENRE : Animation, Action
  • DURÉE : 1h33
  • NATIONALITÉ : Français, Japonais
  • SITE OFFICIELhttp://www.mutafukaz.com/
  • DATE DE SORTIE : 23 mai 2018

 

 

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